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Si
je devais en garder qu'une - Acte 01
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Vous êtes-vous déjà posé la question : "Demain, si je dois garder une moto dans mon coeur et dans ma mémoire, laquelle ce sera ?"
Cette question, après plusieurs machines possédées, m'a été posée plus d'une fois par pas mal de monde. Question à laquelle je ne peux répondre de manière tranchée. Par exemple, je ne peux pas dire que telle ou telle moto est la seule que j'ai aimée car ce serait faux. Je pourrais parler de mon 1100 GSXR de 89 que j'ai aimé énormément et qui m'a souvent manqué, et de mes 900 CBR, ou 1000 CBR ancienne génération avec lesquelles j'ai fait des choses qui à ce jour ne sont pas racontables aux vues de la sacro-sainte sécurité routière. Je ne vous parlerais pas de mes Bol d'Or car là .....
Je pourrais alors vous raconter en long et en large toutes ces motos, mais il n'en sera rien, car il fallait bien aller plus loin dans ma mémoire photographique et trouver des petits détails qui ont fait que telle ou telle machine a marqué ma vie motarde.
Je commencerai par mon 500 XLR de 1983, qui m'a laissé une trace indélébile. Elle n'a pas été parmi les plus belles ou les plus performantes. Achetée neuve en 1983, j'ai dû m'en séparer en décembre 1995, car la pauvre n'était plus réparable après plus de 200 000 km.
Elle en a vu de toutes les couleurs cette machine ! Elle a eu les honneurs de Monde Moto en janvier 1994, et il faudrait plus d'un chapitre pour raconter tout ce qu'elle a vécu, mais en fermant les yeux, il me revient certaines images. Déjà, lors de l'hiver 93 où elle a connu une transformation totale, avec passage du trail utilitaire qui vous traine au taf tous les matins au supermotard.
Le tout au 4 ème
étage de mon studio de Montreuil
Le plus drôle a été la tête de mes voisins quand il ont vu quatre gars monter cette machine par les escaliers Ils ont dû entendre plus d'une fois le doux bruit du XLR lors des réglages moteur. Une autre époque pas si lointaine mais hallucinante quand on y pense aujourd'hui, car de nos jours on aurait du mal à s'imaginer quelque chose comme ça.
J'ai dormi plus de deux mois avec les odeurs d'essence et autres mais cela reste un souvenir de folie. Par la suite, j'ai amené cette machine aux quatre coins de la France et de la Suisse.
La première photo est celle du départ d'une virée en direction de Porcaro, celle qui suit est lors d'un enduro du Touquet ou nous étions partis plusieurs jours. Remarquez que le porte- paquet arrière "maison" est du plus bel effet non ?
La Photo qui suit a été prise dans la région de Grenoble, la suivante est simple car c'est écrit dessus, par contre la cinquième a été prise à la pointe du Raz, bien avant que ne soit construit ce centre commercial moche et bien pourri (il parait que c'est pour préserver le site ....), la dernière fût prise à Vannes et représente un délire encore faisable à cette époque, car aujourd'hui, vu comment ils ont refait le port, ce n'est plus possible.
Comme je vous l'ai dit, ce 500 XLR en a vu et vécu aux quatre coins de France et de Suisse, quand rouler avec un simple trail était logique et respecté par la communauté motarde. De nos jours, pas mal de jeunes n'imaginent pas faire autant de route avec un mono ou un 125, ou tout simplement en moto. Autre époque, autres mentalités dans les grandes villes.
La moto qui me laisse aussi une image gravée dans mon esprit est mon 1000 Big One, un monstre avec lequel j'ai fait les 400 coups sur plus de 100 000 bornes. Les images qui me reviennent en premier sont celles de cette arsouille entre Chamonix et le barrage d'Emosson en passant par le col d'Argentière, puis ensuite direction Martigny par le col de la Forclaz
Bon, je reconnais que mon équipement était sommaire, mais l'instant, lui, est resté magique.
Cette machine était aussi un renouveau dans ma vie motarde, après une période de galère, la rue dans les cartons, l'hosto en fauteuil, la rééducation, le réapprentissage de la lecture et de l'écriture.... Cette moto a été aussi la première machine achetée avec Tazette. Un moment tout simplement extraordinaire
Quelques mois après ma rencontre avec Tazette (lire : Potarement), j'ai décidé de prendre cette machine. Nous avons tellement pris de plaisir avec que son image restera dans un coin de nos mémoires.
Elle avait un look type "Mad Max", une robe noire comme la plupart de mes machines, mais ça, j'y reviendrai plus loin.
Maintenant, parlons de celle qui me marqua à vie la première fois que je l'ai rencontrée en 1997 sur le circuit Carole, invité que j'étais à venir la récupérer pour faire un essai de plusieurs jours pour un magazine moto. Je me souviendrai toujours de la tête des mecs de chez Honda hésitant à nous donner les clefs de cette machine, la première à prendre les 300 compteur en version libre.
C'était le premier missile sur route avec ce Cx. De 1997 à 1999 elle sera à carbus, pour recevoir fin 99 l'injection, et elle ne sera retirée du catalogue Honda qu'en 2007. Aujourd'hui, d'après plus d'un concessionnaire, "si elle était au catalogue on en vendrait encore" et pourtant elle n'a que peu évolué depuis 2000. Elle sera comme le 1100 Gsxr, qui lui a vécu de 1986 à 1999 et représente un mythe dans notre monde. Ces deux machines ont été depuis détrônées de leur piédestal par des motos comme le Wabouza ou ZZR 1400 et pas mal d'autres. Mais elles resteront dans la mémoire de tous les motards de cette époque. Seuls les p'tits jeunes qui ne jurent que par le 1000 hyper sport ou autre vous demanderont "Hein, c'est quoi ce modèle ?".
Mais revenons à cet essai. Comme d'habitude, j'étais là au bon moment, tout simplement. Donc j'arrive avec mon Big One au circuit Carole. Et on avait dû m'entendre arriver de loin, car un pote m'a dit quand je suis arrivé "La vache t'es arrivé fort, le rond-point a dû être pris en version GAZ ?".
Pour expliquer, à cette époque, il n'existait pas les deux carrefours comme aujourd'hui pour arriver au circuit, mais juste après la sortie, pour entrer dans le parking du centre d'exposition de Villepinte, il y avait juste un petit rond-point unique avec un petit mur en pierre d'une hauteur de 50 cm en guise de terre-plein, évidemment d'une dangerosité extrême. Et croyez-moi, il en a vu quelques uns des cartons... Et si vous arriviez vite, il fallait balancer droite/gauche et faire gaffe, car à la corde il y avait un trou. Il fallait aussi remettre les gaz avec prudence dans la ligne droite, car elle était courte pour rentrer dans le parking du circuit. Il fallait aussi faire gaffe, car ce rond-point était toujours sale et couvert de poussière. Donc souvent, quand on zonait sur le circuit, on entendait les maestros arriver avec leur Vance, Devil et autres, et savions qui ouvrait les gaz ..... puéril mais bon ....
Donc mon arrivée fût remarquée, et pendant que derrière moi mon pote Nicolas se remettait de ses émotions (il était blanc), un gars de chez Honda France s'est avancé vers nous pour nous demander : "C'est vous qui venez récupérer le CBR ?" - "Oui". Il repart vers le staff. J'entends Nico me dire : "T'est malade ou quoi Taz, avec mon épaule j'ai frotté le putain de camion dans la courbe.....". Force de reconnaitre que de Nation à Carole, l'excitation de poser mon cul sur cette CBR m'avait fait oublier que j'avais un passager.
Le gars revient vers moi et m'explique qu'il attend que les photos soient faites et me demande de faire quelques tours de circuit. Je ne me souviens plus trop de tout son charabia, mais manifestement, il voulait uniquement se rassurer.
Je monte donc sur le CBR et je fais un, deux, trois tours malgré le sol humide. Ha oui, je ne vous ai pas dit, mais il flottait ce jour-là, d'où l'inquiétude du staff en entendant mon arrivée et à la vue du teint version aspirine de Nico.
J'enquille les tours, et là je retrouve les sensations de mon 1100 Gex. Rapidement, je place la machine là où je veux, je la fais ressortir comme je veux, je passe la puissance sans problème. Et alors là je me dis : "PUTAIN MAIS ELLE EST FAITE POUR MA GUEULE CETTE MOTO !!!"
Je me souviens de ma sortie du circuit quand les mecs de chez Honda ont affiché sur leurs visages un sourire rassuré. On m'a proposé un débriefing, et des potes présents m'ont demandé si je l'avais déjà conduite ou déjà fait des essais avec elle lors de sa présentation au Castellet. Ma réponse a été que non, mais que quand un pilote trouve son âme-soeur sur la route, c'est le genre de chose qui se sent tout de suite. Je prends la pose et repart pour Nation avec Nico.
Il arrivera au Canon de la Nation plus de 20mn après moi. Je ne sais pas pourquoi, mais cette machine a marqué ma vie et mon esprit. Elle remplira mes rêves lorsque mes mirettes se fermaient. De ces rêves les plus fous où vous brûlez le bitume et que tout est possible, et où vous êtes invincible sur la route.
En 2000, j'ai enfin pu me payer cette moto. Enfin, tous mes rêves sont devenus réalité, et même bien plus encore car j'avais le sentiment d'être invincible sur le bitume avec cette merveille.
Avec sa belle robe noire, je parcourais la route, et malheureusement, suite à un accident, je m'en suis vu privé jusqu'au jour de mes 44 ans. Pour comprendre cette fabuleuse histoire, lire ceci.
Maintenant revenons sur le fait que toutes mes motos sont en majorité noires. Pour moi le noir a toujours été le refuge dans des moments durs, une couleur refuge. Là où les autres voient le côté négatif de cette couleur, moi j'y vois une couleur pleine de beauté et une sécurité. La preuve, toutes les motos que je n'ai pas eues noires ont été les seules rares motos avec lesquelles j'ai eu les pires soucis mécaniques, les pannes les plus improbables, même sur des modèles prétendus 100% fiables. Hé bien pour ma pomme, non.
Le noir, j'y suis déjà venu en amont et y reviendrai lors de mon final, mais aujourd'hui, je ne saurais dire, mais le noir me rassure. De plus, ça a de la gueule dans la symbolique, car le noir est associé à :
- La sobriété, l'élégance et le raffinement, la noblesse. (ex : le smoking et autres tenues de cérémonie. Et c'est bien un étalon noir qui est l'emblème de la marque de voiture Ferrari).
- Le mystère, l'inconnu, ce qui est caché.
- L'autorité, la puissance, la dignité, le pouvoir (par exemple la robe de l'ecclésiastique, de l'avocat, du juge).
- La révolte, l'anarchie (le drapeau noir est le drapeau des anarchistes).
- En ésotérisme, la couleur noire est associée à des éléments supposés appartenir à l'autre côté du monde.
L'origine de cette symbolique réside dans le fait que le noir est la couleur de la nuit, de l'obscurité, du non-visible. À l'opposé du blanc, de la lumière. Dans le code de couleurs des résistances électriques et des condensateurs, la couleur noire correspond au chiffre 0. Dans la norme CEI 60757, on le nomme BK (abréviation de black).
Dans le sport et les arts martiaux, la ceinture noire est le grade correspondant au plus haut des dix niveaux. Elle suit la ceinture marron.
Dans l'Egypte antique, le noir avait une symbolique positive. En effet, dans la langue des pharaons le verbe "kem" qui est tiré du mot "noir" veut dire "mener à bien, s'élever à, accomplir, payer, compléter, servir à" mais aussi "être noir". Le mot "kem" veut dire aussi : "complet, parfait, obligation, devoir".
Le noir pour moi représente toute une symbolique et une histoire.
Comment finir ce chapitre sans vous dire que sur le bitume, lorsque vous trouvez votre alter-égo, il faut là garder.
Moi, je l'ai trouvé dans le 1100 CBR noire.
Chapitre 03 |
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